Keynote BPI : Construisons un meilleur avenir

Nous sommes extraordinairement privilégiés d’habiter dans un pays développé au début du 21ème siècle. Nous vivons dans l’ère la plus prospère et paisible de l’histoire de l’humanité. En 1800 aucun pays avait une espérance de vie au-delà de 40 ans. Aujourd’hui elle est de plus de 80 ans dans beaucoup de pays développés. En 1820, 94% de la population vivait en extrême pauvreté. Aujourd’hui c’est moins de 10% à l’échelle mondiale alors que la population est passée de 1 milliard à 7 milliards ! En 1800, nous travaillions plus de 70 heures par semaine pour survivre. Aujourd’hui nous travaillons moins de 40 heures par semaine avec une qualité de vie qui serait prisée par les empereurs d’il y a 200 ans.

Nous communiquons instantanément et souvent gratuitement de par le monde. Nous pouvons voyager d’un bout à l’autre de la planète en une journée. Nous nous attendons à ce que nos emplois soient vecteurs de sens et non pas juste le moyen de survenir à nos besoins.

La technologie explique ce progrès. Sa magie est qu’elle est déflationniste. En rendant les choses accessibles, elle augmente la qualité de vie des gens. Même lors mon enfance seuls les riches prenaient l’avion, avaient des voitures ou des téléphones portables, alors qu’aujourd’hui c’est accessible à presque tous.

Ce n’est pas pour dire que tout est « pour le mieux dans le meilleur des mondes ». La mobilité sociale stagne. L’égalité d’opportunité a baissé dans beaucoup de pays. Nous n’avons pas aidé les laissés pour compte de la globalisation et de la révolution technologique. Nous n’avons pas adressé les conséquences climatiques et écologiques des actions de l’homme sur la planète. La façon dont nous traitons les animaux d’élevage est inhumaine.

Mais, nous avons les moyens d’adresser les challenges auxquels nous faisons face. Nous sommes qu’au tout début de la révolution technologique. Des secteurs entiers qui représentent la plupart de l’activité économique n’ont pas encore été touchés.

Dans la production alimentaire, il faut 12 calories d’engrais pour créer 1 calorie de viande de vache. Pour pallier à ce problème la startup Memphis Meats crée de la viande synthétique à partir de cellules animales sans avoir besoin d’élever, nourrir et abattre des animaux, réduisant les émissions de gaz à effet de serre et les besoins en terre et eau de 90%. Alternativement, Impossible Foods crée de la viande à partir de plantes avec des avantages similaires. J’ai mangé leurs hamburgers et je n’ai pas pu faire la différence avec les vrais !

Dans la restauration, nous sommes au début de la robotisation. Zume Pizza, dans laquelle je suis investisseur, utilise des camions avec des robots pour faire cuire les pizzas et les préparer en chemin vers chez vous quand vous les commandez de votre application mobile. Cela leur permet d’être moins cher, car ils n’ont pas de locaux physiques et de personnel, d’être livré plus vite, tout en étant meilleure parce qu’elle arrive chaude sortant du four et que la compagnie peut se permettre de dépenser plus sur les ingrédients. De même Eatsa, révolutionne les salads bar en automatisant les systèmes de commande permettant d’offrir de la nourriture saine et de bonne qualité pour moins cher.

Dans l’immobilier, des compagnies comme Cubicco et Revolution Precrafted, créent des maisons préfabriquées élégantes, écrasant les couts et temps de production.

Des pays comme l’Estonie montrent comment digitaliser les services publics. Plus de 30% ont voté en ligne aux élections législatives de 2015. 93% des Estoniens paient leurs impôts en ligne. Ils peuvent créer une compagnie en ligne en quelques minutes. Les parents peuvent vérifier les devoirs de leurs enfants, notes, et registre de présence en ligne. Tous les dossiers médicaux sont en ligne.

Je ne m’inquiète d’ailleurs pas des conséquences sur l’emploi de cette robotisation et automatisation. Si je vous avais dit en 1997 qu’en 2017 il n’y aurait plus d’agents de voyages, de guichetiers dans les banques, que la construction automobile serait robotisée et que $500 milliards de commerce serait passé en ligne, et que je vous avais demandé de prédire le taux de chômage en 2017, vous m’auriez dit qu’il aurait explosé. Il est plus bas aujourd’hui qu’il l’était à l’époque. Nous n’arrivons pas à imaginer les emplois de demain, mais ils seront bien là. Célébrons plutôt la disparition d’emplois répétitifs et rébarbatifs qui sont des insultes à l’intelligence humaine tout en aidant et reformant ceux qui ont perdu leurs emplois.

Pour les entrepreneurs et investisseurs dans cette salle, je remarque par ailleurs que la plupart des opportunités sont dans l’application de la technologie plutôt que dans la création de la technologie elle-même. Par exemple, je peux imaginer que les plateformes d’intelligence artificielles soient commodisés et offertes gratuitement par les Facebook et Google de ce monde. Ce qui est intéressant est donc plutôt l’application de l’intelligence artificielle. Si vous construisez une place de marché mobile, l’application pourrait par exemple suggérer un titre, une description, une catégorie et un prix pour le bien que vous vendez à partir d’une photo.

Vous pouvez créer une compagnie qui produit des drones en quelques minutes. Si vous allez à Shenzhen vous pouvez visiter des usines et dire quel moteur, télécommande ou hélice vous voulez. Cela suggère que la catégorie va être commodisé et que le hardware ne sera pas intéressant d’autant plus qu’il y 2 acteurs dominants : DJI et Parrot. L’application de la technologie est encore une fois plus intéressante. Par exemple, une compagnie comme Betterview utilise des drones pour voler au-dessus d’immeubles et informer les compagnies d’assurance de ceux qui ont besoin de maintenance.

Les voitures autonomes vont devenir répandues bien plus rapidement qu’on le suppose. On peut projeter avec précision la baisse des couts des capteurs et des GPUs nécessaires pour de l’autonomie de niveau 5. On peut donc projeter quand cela sera économiquement viable d’utiliser une voiture autonome plutôt qu’une voiture traditionnelle.

Les effets de premier ordre de l’autonomie sont évidents. Chaque année les humains ont 50 millions d’accidents de voitures avec 1.2 millions de morts. Cela va disparaitre et c’est génial. Ce qui est plus intéressant, ce sont les impacts de second ordre. Qu’advient-il quand le cout marginal du kilomètre est essentiellement de 0 ? Cela a des implications profondes car aujourd’hui, par exemple, vous ne commanderiez pas un café sur Deliveroo vu que le cout de la livraison serait supérieur au cout du café. Mais si un drone ou un véhicule autonome vous livrait une boisson en 5 minutes, gratuitement, peut-être que vous n’auriez pas de réfrigérateurs ou machine à café chez vous. Peut-être que vous n’auriez pas de cuisine chez vous vu que l’immobilier coute cher et que de toute façon vous ne savez pas cuisiner. Peut-être qu’en conséquence les restaurants auraient des cuisines plus grandes pour faire face à cette demande de livraisons plus élevée.

Ces effets de second ordre sont profonds et transformatifs. C’est ce à quoi il faut réfléchir pour prédire où va la technologie et où sont les opportunités.

La bonne nouvelle est que des progrès extraordinaires sont en train de se faire dans la robotique, l’impression 3D, Internet des objets, les microsatellites, le solaire et bien plus. En temps qu’entrepreneurs et investisseurs nous avons le privilège de créer ce monde meilleur de demain. Un monde d’égalité d’opportunité et de plénitude. Donc quoi que vous puissiez faire or rêvez de faire, commencez-le. L’audace a du génie, du pouvoir, et de la magie.

Merci !